La question de l’originalité dans une histoire revient très souvent chez les jeunes auteurs. En général, elle survient dès la présentation de l’auteur en question, sous cette forme-ci : « Mon livre parle d’une histoire d’amour impossible/d’une prophétie/d’un orphelin qui travaille dans une ferme…, oui, je sais que ce n’est vraiment pas original, c’est nul, je suis désolé. »
Pas original ? Nul ? Désolé ?
Et si, aujourd’hui, nous tordions le cou à certaines idées reçues ?
Des remarques souvent faites par des gens qui veulent « montrer leur culture générale » (mais qui n’y connaissent rien)
C’est le mal de notre siècle, décuplé par les réseaux sociaux : tout le monde se déclare spécialiste et donne son avis sur tout. Si un jeune auteur raconte son pitch à quelqu’un qui a, un jour, entendu une histoire qui y ressemblait de près ou de loin (souvent de loin), il va aussitôt se prendre dans les dents : « Ah ! Mais j’ai déjà entendu, ça ! Ce n’est pas original, ton truc ! ».
Comment vous dire à quel point cela peut être décourageant ?
Et surtout, à quel point cela peut être inapproprié ?
Parce que, vu le nombre de livres qui existent actuellement, vous pouvez être sûr que le thème de votre roman a déjà été abordé par quelqu’un d’autre. Forcément. Et vous tomberez forcément sur quelqu’un qui connaît cet autre roman et qui, fièrement, vous dira que « le thème de votre roman n’est pas original », pour montrer qu’il a de la culture générale.
Et vous savez quoi ? En fait, on s’en fiche. Pourquoi ? Eh bien parce que :
Originalité du thème ne rime pas (du tout) avec intérêt du lectorat !
Posons-nous ici la bonne question : le thème de l’histoire doit-il absolument être original pour donner de l’intérêt à un roman ?
Ne tournons pas autour du pot, la réponse est NON. Et je l’illustre immédiatement.
Prenons le thème qui est probablement le plus récurrent dans les genres de l’imaginaire : un jeune orphelin élevé par sa tante découvre que ses parents étaient des gens extraordinaires, puis s’entoure d’amis pour accomplir une quête, et en plus, il y a une histoire de prophétie.
Quelle saga reconnaissez-vous ?
- Harry Potter ?
- Star Wars ?
- Les chants de la Belgariade ?
- Eragon ?
- One Piece ???
Toutes les cinq répondent à ce pitch et pourtant, il serait bien difficile de comparer ces cinq histoires.
Un autre exemple : un vieux sorcier décide d’aider un homme de sang royal à gagner sa couronne et il y a aussi une histoire de prophétie. À qui avons-nous affaire ?
Vous avez pensé à :
- Merlin l’Enchanteur ?
- Les chants de la Belgariade (encore !) ?
- Le Seigneur des Anneaux ???
On est d’accord pour dire que ces histoires ne se ressemblent pas tout à fait ?
Un dernier exemple pour les plus sceptiques (et parce que c’est rigolo) : deux jeunes gens fous amoureux voient leur famille grincer des dents devant leur amour (fastoche, ça !). Il s’agit de…
- Roméo et Juliette ?
- Twilight ?
- Pocahontas ???
Je vous passe les exemples d’histoires avec des vampires pas si méchants que ça et tellement sexys.
Ou bien celles avec des gens qui découvrent un monde surnaturel en rencontrant quelqu’un qui en vient (c’est même le thème central de la majorité de mes romans ! Scorpi, Aurora, Signé Sixtine…) 😉
Mais alors où se cache l’originalité ?
Nous sommes donc tous d’accord : l’originalité d’une histoire ne se cache pas dans son thème. Alors où ?
En réalité, l’originalité, c’est l’auteur lui-même. C’est sa plume, c’est la façon dont il traite le thème décliné. Ce sont les émotions qu’il fera surgir au fil des mots.
Certes, Merlin et Gandalf suivent la même route en aidant Arthur et Aragorn à monter sur le trône qui leur revient. Mais ils n’ont pas la même personnalité, pas la même vie, pas les mêmes personnages qui gravitent autour d’eux, pas la même époque, pas les mêmes moyens. Ils ne s’expriment pas de la même façon car, à travers leurs paroles, c’est l’auteur qui parle.
Et ça, c’est unique.
Votre ton, votre énergie, votre façon de traiter un sujet (aussi commun soit-il), sera forcément unique. Parce que vous êtes vous, parce que vous êtes unique.
Bien entendu, si vous décidez d’écrire l’histoire d’un petit garçon malheureux qui découvre qu’il est sorcier, qui va dans une école de sorciers, qui a un meilleur ami roux et une meilleure amie première de classe, avec un grand méchant qui lui en veut personnellement, et un vieux directeur qui s’appelle Dumbledargent, ça risque de coincer. Mais ça, vous le savez déjà.
En dehors de ça, tout est bon !
Et si quelqu’un vient vous embêter avec des « ton thème n’est pas original », donnez-lui les exemples ci-dessus. Sachant que toutes les sagas citées sont des succès internationaux, aussi bien en librairies qu’au cinéma, ça le fera peut-être réfléchir… 😉
Tous différents
Certaines théories vont jusqu’à dire qu’en réalité, toutes les histoires n’en sont qu’une seule, déclinée à l’infini. Déclinée par cet être unique et inimitable que nous sommes, chacun d’entre nous, à notre façon, avec notre sensibilité, notre sagesse, notre folie, notre imagination.
Donnez le même pitch, avec les mêmes personnages de base, à trois écrivains différents, aucun ne vous sortira la même histoire. Chacun traitera le pitch avec sa propre plume, chacun interprétera les personnages avec son âme.
Si vous n’êtes pas convaincu, proposez ça comme jeu en soirée : fous rires garantis et vous en sortirez rassuré !
D’ailleurs, certaines maisons d’édition jouent de ce phénomène d’unicité de chaque écrivain : elles proposent des appels à texte avec un pitch, les auteurs envoient leurs manuscrits écrits sur la base de ce pitch, et la maison ouvre une collection de romans tous différents. C’est bien la preuve que l’originalité n’est pas dans le thème. 😉
Faites confiance à votre plume.
Faites confiance à votre imagination.
Et faites confiance à votre âme, à ce qu’elle a à raconter.
Vous êtes unique. Votre roman aussi.
Pour aller plus loin…
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Cet article est une version augmentée de la version initialement publiée sur le site Espaces Comprises, le 29 mai 2013